
Qu’il s’agisse des contes fantastiques, contes de fées, épopées ou mythes, tous ont fait partie de notre jeunesse et nous ont indéniablement influencés d’une manière ou d’une autre. Comme toutes les histoires, elles possèdent une certaine moralité ayant pour but de susciter, d’inculquer un mode de pensée ou mode de vie.
Qu’est ce qu’une histoire de princesse ?
Une histoire de princesse est avant tout un conte comportant certaines spécificités et particularités, à savoir une trame narrative simple composée des éléments suivants : une jeune fille (princesse), un méchant/une méchante, un château, un jeune homme (prince), un point culminant et un dénouement heureux.
Il est donc intéressant de voir comment ces contes influencent et forment en partie l’enfance et la vie future ; plus particulièrement chez les petites filles qui s’identifient plus facilement à l’image de la princesse.
Les princesses possèdent certaines caractéristiques physiques, psychologiques et morales qui leur sont propres. Propres à l’idéal d’une « princesse parfaite ». En brossant leur portrait aussi bien physique que psychique, elles possèdent toutes certaines similitudes : une belle jeune fille aussi innocente que docile ayant comme destinée d’inévitablement rencontrer un prince et d’avoir beaucoup d’enfants avec.

Voir aussi : La psychologie des contes de fées
Les personnages d’histoires de princesses :

Les contes de fées possèdent d’une façon ou d’une autre au moins un personnage issu de la royauté ; l’intrigue tourne donc généralement autour du roi, de la reine et de leurs héritiers à savoir les princes et princesses. En effet les contes se concentrent davantage sur la progéniture du couple…
Cependant l’histoire tourne davantage autour de la princesse : personnage central. Son portrait est systématiquement présenté en début de conte, spécifiant sa beauté, sa pureté et sa gentillesse. Elle est convoitée, désirée mais aussi enviée par les autres femmes ; typiquement la belle-mère de Blanche Neige dans Blanche Neige et les Sept Nains. Un exemple connu illustrant le fait que dans ces contes les reines sont jalouses de la beauté et de la jeunesse des princesses.
La princesse serait-elle parfaite ? L’idée de perfection aussi subjective qu’idéalisée peut en effet influencer le mode de vie des jeunes filles qui voient à travers ces contes leur vie idéalisée. Des descriptions incitant la création de normes de vie se basant sur un schéma typique : l’enfance, la jeunesse, le mariage et la famille. Cet ordre ne peut ne pas être ; le lecteur est ainsi témoin de la transformation de la jeune fille en femme, épouse, puis mère. Le prince est celui qui vient dérober un baiser, brisant son innocence et la rendant donc épouse. Ce schéma de la vie d’une princesse n’est autre qu’un reflet du schéma exigé pour la vie d’une jeune fille. Le mariage est ainsi considéré comme l’achèvement de la jeunesse, de l’innocence et le commencement d’une nouvelle vie, à priori perçue comme plus heureuse.
L’amour conditionné par les contes
D’une manière plus générale et dans la vraie vie, le statut de princesse possède une caractéristique quasi-divine et sacrée : le cas en est avec la famille royale d’Angleterre. Devenir une princesse est un « un rêve de petite fille ». La jeune fille d’apparence ordinaire a trouvé son prince, elle incarne donc pour toutes les petites filles la version réelle des princesses de contes.
D’autant plus nombreuses sont les personnes employant l’expression « trouver son prince charmant ». Quelque chose de relativement symptomatique puisque cela signifie que même l’idée de l’amour est conditionnée par les histoires de princesses. Rien ne définit dans les contes le portrait du prince, excepté sa supposée beauté ; la princesse ne peut que tomber sous son charme et accepter ses avances.
Dans les contes traditionnels, la jeune fille était omniprésente sous les traits de la princesse, de la fiancée ou de la fée. La mythologie l’avait considérée (…) comme le symbole du désirable, comme celle dont la beauté réveille la concupiscence des dieux ou peut devenir une cause de guerre entre les hommes. Elle a aussi été une créature importante du théâtre et du roman entre le XVIIe et le XIXe siècle sous les traits de la promise, de la fille à marier.

Les histoires de princesses influencent en effet l’idée même de l’amour et dès lors imposent un certain comportement rendant la jeune fille ou la femme passive, à attendre son prince qui viendra la secourir d’un danger ou de la délivrer de son ennui. Aucune histoire ne se contente d’une princesse seule. Le prince est un élément indispensable à l’aboutissement de l’histoire puisqu’il vient secourir d’une façon ou d’une autre la princesse. Nous sommes ainsi les témoins d’une épopée princière. Le prince part à l’aventure, se bat afin de récupérer son bien qui lui est dû : la princesse. L’amour est le centre d’intérêt de toutes les intrigues dont en résulte nécessairement le mariage et les enfants (« ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ») : le conte merveilleux offre un idéal de bonheur et la jeune fille n’a pour but que la procréation.
L’indépendance des princesses

Il s’agit bien entendu dans ces cas de figures des contes dits traditionnels qui se devaient de respecter un schéma précis à une époque précise. On ne parle dès lors plus de contes mais de films ou encore franchises, comme les Princesses Disney de Walt Disney. Ces nouvelles princesses dites « modernes » s’adaptent à notre société et aux nouveaux enjeux notamment celui de l’égalité homme/femme.
Dès lors, nombreuses sont les histoires de princesses présentant la jeune fille en tant que guerrière (comme Mérida dans Rebelle) cherchant justement à s’affranchir de l’image de la traditionnelle princesse, ou bien des princesses ne cherchant pas nécessairement un prince (comme Vaiana, Elsa, Tiana) comme dans les ouvrages ci-dessous :
Comment séduire une princesse ? de Louise Nakos & Érik L’Homme et Ne m’embrassez pas (je suis très bien comme ça !) de Tullio Corda.

Le prince ne parvient plus aussi facilement à séduire la princesse, cette dernière étant tout aussi épanouie en restant seule. La jeune fille n’est plus passive mais active, elle aussi veut partir à l’aventure et ne pas se marier avec le premier prince qu’elle rencontre ; rompant ainsi le schéma précédemment expliqué. La jeune fille devient parfaite à sa façon et non pas à travers un modèle.

Voir aussi : Le conte revisité
Sources :
- Pierre Péju, « La jeune fille merveilleuse », La lettre de l’enfance et de l’adolescence 2010/4 (n° 82), p. 13-24. DOI 10.3917/lett.082.0013
- Christine Détrez, « Les princes et princesses de la littérature adolescente aujourd’hui. Analyses et impressions de lecture », La lettre de l’enfance et de l’adolescence 2010/4 (n° 82), p. 75-82. DOI 10.3917/lett.082.0075
- Monzani, Stefano. « Pratiques du conte : revue de la littérature », La psychiatrie de l’enfant, vol. vol. 48, no. 2, 2005, pp. 593-634.
- Roxane Paillier, «La place des contes dans les programmes scolaires», Agôn [En ligne], Dossiers, (2014)