Extrait du livre Chamalla
Chamalla de Claude Burneau et Alessia Bravo aux éditions Motus
Chamalla
Ne dites jamais à Chamalla qu'elle est toute ronde, toute douce, toute tendre. Elle se fâcherait tout pointu, tout dur et tout rouge. D'accord, Chamalla a une bouille ronde, des yeux très doux. Mais elle n'a rien de tendre. Et elle n'a peur de rien. De rien ni de personne. Ne dites pas à Chamalla qu'elle est une princesse. Elle déteste les princesses. Elle déteste les fées, les princes charmants et les histoires qui finissent bien. Ce qu'elle aime, Chamalla, ce sont les histoires d'OGRESSES.
Mais les VRAIES ogresses. Celles des livres. Pas les fausses qu'on rencontre dans la vie. Pas comme grand-mamie, par exemple, qui joue à l'ogresse : « Cette enfant, on en mangerait. » Bon d'accord, grand-mamie, elle pique un peu quand on l'embrasse et elle a une odeur bizarre… Mais c'est juste grand-mamie, pas une ogresse.
Le spécialiste des histoires horribles, c'est papa. Le soir, Chamalla attend avec impatience qu'il s'approche du lit pour lui raconter comment on aiguise les grands couteaux, comment on engraisse les enfants, comment on les fait mijoter devant la cheminée.
Maman n'est pas d'accord. Elle dit que ce n'est pas de son âge, qu'elle va faire des cauchemars. Maman est ridicule. Chamalla n'a peur de rien ni de personne, surtout pas des ogresses que papa fait disparaître en riant, juste avant qu'elle ne s'endorme.
C'est le matin. Un chat miaule dans le jardin. Quand Chamalla s'approche, il s'enfuit dans la rue. Elle le suit. Elle sait qu'elle n'a pas le droit, qu'elle va se faire gronder. Mais Chamalla n'a peur de rien ni de personne. Pas même des punitions de maman. Et puis le chat est si mignon.