Extrait du livre Ambre, la petite guérisseuse
Ambre, la petite guérisseuse De Virginie Maillot, illustré par Carla Cartagena Éditions La Pimpante
Ambre aimait l'odeur du petit matin. Cette odeur singulière qu'avait l'herbe à son nez fin. Le hululement de la chouette de son rêve se mêlait aux pleurs de Martin, son petit voisin, qui confondait la nuit et le jour et s'endormait souvent chagrin. - Bonjour les fleurs ! chantait-elle à tue-tête. Salut la libellule ! La ronde d'escargots reconnaissait son pas sûr et serein. Ce n'était pas l'heure de cueillir le millepertuis, mieux valait attendre les douze coups de midi, même si le solstice de juin approchait, vu les rougeurs que prenaient les joues de son ami Angelin.
Un coup d'oeil dans l'abreuvoir des vaches, un autre sur la cime des montagnes sans nom. Écouter le vent faire tomber quelques bébés grenades, passer sa main dans l'allée de thym. Demain, demain, il y aura école. Heureusement, demain, c'est loin, pensait-elle joyeusement. Sur le chemin entre la maison et l'épicerie - papa cuisinera du gratin coco ce soir - il y avait du romarin... et des jusquiames ! Des orchidées terrestres et des plumes de la tourterelle.
Ah tiens, la voilà la tourterelle, avec son amoureux, sur la branche de l'aubépine. Ce bel arbuste, dont lui parlait encore sa mère hier en passant sur ce chemin, n'était autre que feu sa tantine transformée, comme le veut la légende, de sorcière en buisson d'aubépine. Dans la clairière, juste derrière, l'appelaient les lutins. - Bonjour le faune, que puis-je faire aujourd'hui pour votre arbre ? Dérouler cette ronce qui n'en fait qu'à sa tête ? Ambre fit bien attention à ne pas se piquer et enroula la ronce respectueusement autour du tronc du vieil if d'à côté.
Quel bonheur de marcher pieds nus dans la nature, sans semelles qui empêchent de sentir la rosée. Quel bonheur d'être des orteils aux talons mouillée, chatouillée, caressée par le doux ventre de la forêt, et de s'allonger sur le dos juste sous le soleil levant. Ce n'était pas la route la plus cour te pour se rendre chez l'épicier, mais étant donné que maman laissait toute liberté à Ambre de crapahuter, elle pouvait faire à sa guise et cela lui plaisait drôlement.