Extrait du livre Le Cadeau des quatre saisons
Le bohémien descend doucement du haut d’un arbre avec la première feuille que l’automne fait tomber. Le canard sauvage, ayant terminé sa nage matinale, le croise lors de sa promenade sur le sentier au bord du lac.
« L’automne est une saison faite pour la rêverie, dit le bohémien en contemplant le canard sauvage. Tendre sera la nuit, pour laquelle nous mettrons de côté des couleurs chatoyantes. » Sur ce, le bohémien esquisse son premier sourire de l’automne. Il tend son bras pour caresser le bec du canard avant de disparaître au tournant du sentier. Au bout de son bec, le canard ressent une bouffée de chaleur intense qui l’entraîne en avant. Spontanément, il lève la tête. Son cou de couleur verte s’étire bientôt en une ligne droite et gracieuse. Ses yeux noirs comme la laque s’ouvrent vers le haut, où un ciel d’azur l’appelle avec une douceur infinie.
Aussitôt, l’envie de s’envoler naît dans le cœur du canard. Elle part de sa poitrine, anime ses ailes et atteint les quatre plumes du bout de sa queue. Une seconde plus tard, il vole déjà comme un cerf-volant. Lorsqu’il se laisse porter par les courants pour atterrir en douceur, il découvre avec émerveillement les nombreuses teintes qui colorent son ombre ! Le canard n’en croit pas ses yeux. Il bat des ailes afin de regagner le ciel et contempler de nouveau son ombre au sol. Non, il ne se trompe pas : elle est remplie de couleurs nuancées. Suivant son mouvement dans les airs, elle court sur les gazons, caresse les pierres et pénètre la forêt. Vue du ciel, elle prend l’apparence d’un arc-en-ciel volant.
Tantôt haut, tantôt bas, le canard heureux fait plusieurs tours du lac en planant. « Quelle journée merveilleuse ! »