Extrait du livre Fred est amoureux
Fred est amoureux de Fanny Joly et Claire Franek aux éditions Fanny Joly Numérik
Ça a commencé comme un mercredi tranquille. Il y avait du soleil et des débuts de feuilles aux arbres. Je jouais au foot avec Mouloud au square des Héros, à côté. Moi c’est Fred. Mouloud c’est un copain de mon immeuble. Mouloud habite au cinquième étage et moi au premier. Il est super sympa, sauf qu’au foot il veut tout le temps faire attaquant, jamais goal, c’est un peu saoulant... Bref. Je venais - enfin - de passer attaquant quand Maman est arrivée en courant.
- Hé les footballeurs, vous avez vu l'heure ? Le papier vert que Maman agitait, c’était l’invitation à l’audition de violon d’Héloïse Crampon et ça commençait dans dix minutes. Héloïse est la fille des voisins super sérieux du quatrième. Mouloud et moi on s’est regardés comme si ma mère parlait chinois. - Et alors ? on a dit presque en même temps. J’ai shooté. Maman a intercepté mon tir avant Mouloud. Mouloud a demandé très poliment à Maman de lui rendre son ballon vu que l’audition, il n’allait sûrement pas y aller, vu que son père avait jeté l’invitation, vu que le crin-crin d’Héloïse Crampon ils l’entendaient déjà assez comme ça à travers les cloisons… Maman a pincé les lèvres et m’a tiré par le bras : - Eh bien nous, on y va !
J’ai demandé à Maman pourquoi ce truc s’appelait Chou vert. J’aurais mieux fait de me taire. Elle a passé tout le chemin à m’expliquer que ce n’était pas un « truc » mais une école de musique et que ça ne s’appelait pas « Chou vert » mais Schubert, en l’honneur de Franz Schubert, l’un des plus grands compositeurs qui ait jamais existé sur terre et que je ferais bien de m’intéresser davantage aux gens qui font des choses intéressantes comme par exemple Héloïse qui est si sérieuse et qui joue du violon et qui a un an d’avance en classe ! (Merci, je suis au courant, on est dans la même école…)
Maman a rentré mon tee-shirt dans mon short (je déteste). - Et regarde-moi comment tu es attifé ! - Et t’as vu comment il est attifé, ton Schubert ? J’ai protesté. Ses cheveux, on dirait des poulpes et son manteau une serpillière… - Arrête de dire n'importe quoi ! Elle a poussé la porte et là…
… LA, JE L’AI VUE. La scène était pleine de filles en tutu. Mais je ne voyais qu’ELLE, vrai de vrai, comme si elle seule était éclairée. Elle souriait en faisant des petits sauts. Ses boucles dorées dansaient en même temps qu’elle. Elle ressemblait à une apparition de fée.