Extrait du livre Ronarou
RONAROU De Yves-Marie Clément et Flore Avram Editions Kilowatt
RONAROU
Chapitre 1 Je m’appelle Mia Williams-Brown, j’ai neuf ans. J’habite dans une ferme avec mes parents, loin de la ville et de ses bruits, loin des usines qui fument dans les nuages. Loin des routes, des autos et des camions qui grondent sans trêve. J’aime la nature
qui murmure à mes oreilles, le vent qui soupire, les insectes qui vrombissent, le vent qui siffle l’hiver. J’aime entendre la neige crisser sous mes pas. Et l’été, j’aime m’asseoir dans l’herbe et la caresser. Vendredi 18 août C’est l’après-midi. Je me suis allongée dans le jardin et j’observe un hanneton, quand j’entends gratter derrière le muret, à l’endroit précis où je dépose chaque matin un bol de restes de nourriture sur lequel j’ai écrit : « En libre service pour tous les animaux de la Terre ». Les chats du village, mais aussi les corneilles et les pies, et d’autres animaux sauvages viennent s’y restaurer. Une fois, j’ai même surpris une fouine en train de se régaler !
Il faut dire que chez les Williams-Brown, on aime les animaux. À la ferme, il n’y a pas moins de dix poules, deux canards, trois biquettes, une oie, trois lapins, deux chats, et Sibelle, notre vieille chienne. Je retiens mon souffle, je tends l’oreille. Je me dis qu’il doit s’agir d’un gros animal, car il fait beaucoup de bruit. Je me dirige vers le muret en marchant à croupetons. Je pose la main sur les pierres chaudes, je me relève doucement, et là… Je me retrouve nez à nez avec une renarde ! Mon cœur s’affole. L’animal s’écarte un peu du bol sans me lâcher du regard. C’est une renarde avec de belles mamelles, elle doit avoir des petits ! J’admire son museau blanc, sa truffe luisante, ses beaux yeux jaunes bordés de grands cils noirs, et ses pattes couleur charbon. On dirait qu’elle a enfilé des chaussettes. Le soleil fait briller son pelage ! Elle est magnifique avec ce pinceau blanc au bout de sa longue queue. Jusqu’à maintenant, je n’avais jamais vu de renarde de ma vie. Du moins en vrai. Un véritable cadeau de la nature ! Je dis à voix basse : – Coucou, Renarde ! C’est sorti tout seul de ma bouche. Je me doute bien que Renarde ne me répondra pas. – Tu es belle. Tu aimes les restes de nourriture ? Tu as vidé le bol. Je veux bien t’en donner encore si tu veux. Renarde se retourne et se dirige tranquillement vers le bois qui borde la ferme. Sans trop réfléchir, je décide de la suivre. Je me dis que je pourrais peut-être l’accompagner jusqu’à sa tanière.
– Eh, Renarde, attends-moi ! Mais déjà, elle a disparu. Je rentre à la maison et me précipite sur le téléphone pour raconter cette rencontre extraordinaire à Lilou, ma meilleure copine. Chapitre 2 Samedi 19 août C’est l’après-midi. Avec Lilou, on se poste dans le jardin et on attend. Ça y est, on gratte derrière le muret. Renarde est revenue. Je chuchote : – Bonjour, Renarde.
Elle vide tranquillement le bol et traverse le chemin en direction des bois. Je fais signe à Lilou de me suivre. Renarde est plus rapide que nous. Mais de temps en temps elle s’arrête et nous regarde. On dirait qu’elle nous attend ! J’éprouve un sentiment de peur, comme un léger frisson presque agréable. Je ne pense même pas qu’on pourrait se perdre. Je suis tellement attirée par ce bel animal que je ne me pose pas de questions ! Je suis impatiente de savoir où Renarde nous emmène. Peut-être allons-nous rencontrer sa famille ? Renarde s’arrête devant un trou creusé au pied d’un chêne, l’entrée de sa tanière. Des oiseaux chantent. Un pivert traverse les feuillages. Juchées sur une branche, deux tourterelles observent la scène.
