Extrait du livre Agatha Christie - Reine du crime
Agatha Christie Reine du crime L'histoire d'Agatha Christie, racontée et illustrée par Laure Monloubou. Aux Éditions amaterra
Agatha Christie Reine du crime
1 – Agatha Mary Clarissa Miller ! Où vous cachez-vous ? s’époumone Mrs Miller.
– Notre fille a encore disparu ? s’amuse Mr Miller. – Je ne la trouve ni dans la cuisine, ni dans la bibliothèque ! – Il faudrait songer à jeter un œil dans le parc, mon amie, conseille son mari. – Nursie est partie à sa recherche. Et les invités qui vont arriver ! Nursie, la nounou d’Agatha, est effectivement en train d’arpenter le grand parc d’Ashfield, la maison des Miller, située dans la ville de Torquay, tranquille station balnéaire du sud de l’Angleterre. Agatha a pour fâcheuse habitude de s’évader où cela lui chante : en cuisine pour goûter les plats et autres délicieux desserts de Mrs Rowe, dans la bibliothèque pour rêver devant les livres, ou dans le parc, terrain de jeu idéal pour inventer une myriade d’aventures et d’histoires. Quand Nursie la retrouve enfin, Agatha est en pleine bataille, une branche à la main : – Mais, nounou… Le capitaine m’a fait demander, nous luttons contre les bandits et… – Allez, allez, miss Agatha ! Passez à la salle d’eau pour laver vos mains puis filez au salon, les invités et le repas vous attendent ! – Ah oui ! Qu’est-ce qu’on mange ?
Après un copieux déjeuner, Agatha court se plonger dans quelques romans ; grâce à eux, elle a appris à lire seule, elle a aussi découvert le pouvoir de l’imagination. Son esprit aiguisé tourne à vive allure et lui permet de créer toutes sortes de situations et de personnages : elle se rêve entourée d’animaux domestiques ou s’invente des camarades de jeu. Agatha est en effet bien seule ; elle ne va pas à l’école. Ses parents, constatant ses aptitudes intellectuelles, ont choisi de faire eux-mêmes son instruction. Elle est aussi très soutenue par sa grande sœur Madge, qui l’encourage à écrire des histoires, et par ses grands-mères, exubérantes grannies qui n’ont de cesse de la couvrir de livres. Ces affectueuses mamies sont une source inépuisable d’anecdotes et de récits, qu’elles racontent à leur petite-fille autour d’un thé accompagné de savoureux scones à la marmelade. Elles aiment évoquer avec Agatha l’époque victorienne qu’elles ont traversée : les découvertes scientifiques et le fameux Charles Darwin, les auteurs comme Charles Dickens ou Lewis Carroll.
Ces doux moments de joie vont prendre fin : Agatha n’a que onze ans lorsque son père disparaît brutalement. Toute la famille va devoir apprendre à vivre sans lui. 2 Un jour, pour stimuler Agatha, sa grande sœur Madge lui lance un défi.
– Toi qui aimes tant les enquêtes, les intrigues et les meurtres à élucider, te sens-tu capable d’écrire un roman policier ? lui demande-t-elle. – Mais tout à fait ! Je le ferai, c’est juré ! Et tu seras épatée ! – Eh bien, j’attends de voir. – Je vais m’y mettre… mais je dois d’abord préparer ma vie d’adulte ! J’ai déjà seize ans, Madge. Je veux, comme toi, aller à des bals pour trouver un mari, avoir une charmante demeure avec un beau jardin… et puis, ce que j’aimerais par-dessus tout, c’est chanter à l’Opéra. Si le rêve d’Agatha est de devenir chanteuse lyrique, qu’à cela ne tienne : direction Paris ! Pour Mrs Miller, pas de doute : le meilleur endroit pour l’apprentissage de la musique et du chant, c’est la France. Elles font donc toutes deux leurs valises et prennent le train à destination de la capitale française.
Agatha s’exerce chaque jour auprès d’une professeure de musique pour réaliser son grand rêve. Piano, solfège, gammes, vocalises, Agatha se plie à tout. Vient enfin le moment où elle doit monter sur scène et montrer ce dont elle est capable : mais Agatha ne se sent pas bien ; son cœur palpite, ses mains sont moites, ses jambes tremblent, d’étranges symptômes l’engourdissent. – Maman, maman… C’est impossible, pleure Agatha, je ne peux pas… Chanter devant tous ces gens, cela m’est insupportable… J’ai le trac… Rentrons, maman, s’il vous plaît, rentrons à Torquay !