Extrait du livre Loango et la vague enchantée
Loango et la vague enchantée Pascale Vignali Illustrations Mathilde Menet dans la collection "L'heure du conte" aux Editions Le Regard Sonore
Il était une fois un petit pays perdu sur une côte cachée de la grande Afrique. C’était un royaume secret, protégé par une forêt immense, aussi vieille et mystérieuse que le temps lui-même. Je vous parle du royaume de Loango, au Gabon. À l'époque où commence notre histoire, personne ne connaissait ce petit paradis, personne à l’exception du peuple des Pounous qui en savourait chaque jour la beauté …
Les Pounous vivaient de chasse et de cueillette en lisière de forêt. Les hommes étaient aussi de merveilleux tisserands et les femmes d’habiles potières. Le petit Loango lui, passait ses journées à vagabonder en jouant de sa sanza. Charmé par la musique, son ami Kokolo le pangolin trottinait toujours sur ses talons.
La seule qui parvenait à retenir Loango à ses côtés était sa grand-mère, Mame Tsaku, surtout lorsqu’elle sculptait un masque dans son atelier : Mame: Tiens, tiens, vous voilà ! Loango, distrais donc mes vieilles oreilles avec ta musique pendant que je prépare ce masque Mukudji : hier matin, notre voisine a accouché de magnifiques jumeaux, à peine plus gros que deux noix de coco ! Nous allons faire une grande fête pour leur naissance et le masque exécutera une danse pour leur porter chance ! En chantant Tsayé- tsayé, tsayé-tsayé, yéyéo, tsayé-tsayé, tsayé- tsayé, yéyéo...
Loango : Mame Tsaku, pourquoi le masque Mukudji est–il si important ? Mame: C’est parce qu’il représente l’esprit de tous les esprits ! Il veille sur les Pounous et nous accorde sa protection quand nous dansons pour lui… Loango : Mais ce n’est qu’un morceau de bois ! Je n’ai jamais vu d’esprit sortir d’un de ces masques pour me protéger ! Mame: Ah… ça mon petit Loango, c’est parce que tu regardes seulement avec tes yeux… Un jour tu sauras comment regarder avec ton cœur. Tiens, par exemple… mon herminette. Pour toi ce n’est qu’un vulgaire instrument pour sculpter le bois… Pour moi, c’est bien plus que cela...
Loango : … hum ! Et… Et Est-ce que je pourrai porter le masque pendant la cérémonie ? Mame: Plus tard, peut-être… Lorsque tu seras grand… Loango : Pff !!! Il faut toujours attendre d’être grand pour faire des choses intéressantes … Moi je voudrais faire quelque chose que personne n’a jamais fait au village ! Mame: Eh bien… hum… Va compter les vagues ! Si tu es suffisamment patient pour compter jusqu’à la mille-et-unième, tu auras une surprise… Loango : Mille-et-une vagues ? Mais Mame Tsaku, c’est troooop long…!!!! Mame: Justement, c’est bien pour cela que personne ne l’a jamais fait ! Voilà une chose exceptionnelle ! Allez zou, laisse-moi finir ce masque pour les jumeaux noix de coco ! Loango : Pffff… Bougonnant, Loango partit en traînant les pieds vers la plage...
Assis au bord de l’eau, le petit garçon se mit à compter d’un ton morne : Loango : 1, 2,3 … Loango s’appliquait… Loango : ….54…….55… Le temps passait lentement… Loango : ...372, 373, 497… Loango sentait ses yeux devenir lourds de sommeil… Loango : ...497… Mais il s’obstinait. Au fur et à mesure que les vagues défilaient, Loango : … 498… Loango se frottait les yeux, plissait le nez, soupirait… mais il tenait bon. Loango : … 499…
Il était tellement concentré qu’il ne remarqua pas tout de suite que le temps changeait. Loango : …998... Le vent prenait de la vigueur, le sable ondulait. Et les vagues… Loango : …999… Rêvait-il ou bien se soulevaient-elles un peu plus haut à chaque fois... Loango : …1000... ... comme attirées par le ciel ?
Des rafales de sable tourbillonnaient maintenant autour de Loango et Kokolo. Soudain … Loango : …1001 !!! Ils virent la mer se gonfler comme une vague géante et se rassembler en un tourbillon immense qui montait sans fin vers le ciel. Aveuglés par une bourrasque, ils fermèrent les yeux pour se protéger… puis tout à coup, ce fut le calme total.
Loango ouvrit prudemment un œil : L’océan flottait paisiblement au-dessus de leurs têtes comme s’ils regardaient le monde à l'envers. Loango : Hum ! Wouah ! Loango n’en revenait pas. Loango : Ah ! Incroyable ! Mame Tsaku avait raison, la mille-et-unième vague est bien une vague enchantée !!! Viens !