>   Hôtel Bordemer Tome 3 : Héros zéro
Hôtel Bordemer Tome 3 : Héros zéro

Hôtel Bordemer Tome 3 : Héros zéro

9-12 ans - 38 pages, 10567 mots | 1 heure 17 minutes de lecture | © Fanny Joly Numérik, 1999, pour la 1ère édition - tous droits réservés


Hôtel Bordemer Tome 3 : Héros zéro

9-12 ans - 1 heure 17 minutes

Hôtel Bordemer Tome 3 : Héros zéro

En ce beau mois d'août, le soleil brille et l'hôtel de mon père est plein à craquer.

Bref, c'est le bonheur ! Qui ne dure pas hélas : un riche couple d'Américains a décidé de passer quelques jours à l'hôtel. Mon cher Papa est aux anges. Moi, je suis loin de partager sa joie : leur fils est champion en tout et surtout en frime. Ce qui n'est pas pour déplaire à mon amie Rosy. Entre lui et moi, il va falloir qu'elle choisisse !

"Hôtel Bordemer Tome 3 : Héros zéro" vous est proposé à la lecture version illustrée, ou à écouter en version audio racontée par des conteurs et conteuses. En bonus, grâce à notre module de lecture, nous vous proposons pour cette histoire comme pour l’ensemble des contes et histoires une aide à la lecture ainsi que des outils pour une version adaptée aux enfants dyslexiques.
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Extrait du livre Hôtel Bordemer Tome 3 : Héros zéro

Hotel Bordemer, une serie de 11 romans écrits par Fanny Joly Editions Fanny Joly Numerik Tome 3 : Héros zéro


Héros Zéro
Dans ce livre c'est moi Georges Albert Bordemer qui raconte l'histoire. J'ai 10 ans.
Chapitre 1 Beau fixe Je ne sais pas si vous êtes comme moi : moi j'adore quand tout va bien. Ça n'arrive pas si souvent, finalement. Chez nous, par exemple, à l'hôtel Bordemer, c'est incroyable, le nombre de raisons qui peuvent faire que les choses aillent de travers... (Je dis « chez nous » parce que je suis le fils du patron de l'hôtel. Mon prénom, pour ceux qui ne me connaîtraient pas encore, c'est Georges-Albert. Georges-Albert Bordemer, comme l'indique le panneau de l'hôtel !) D'abord, sur les treize chambres de l'hôtel, il y a toujours des clients mécontents, des grin­cheux, des mal fichus, des qui sont venus pour s'amuser et qui trouvent qu'on ne s'amuse pas assez, d'autres qui sont venus pour se reposer et qui trouvent qu'on ne se repose pas assez, ou qui jugent l'eau du robinet trop chaude et celle de l'océan trop froide, ou inversement... Bref, à écouter les clients, ça ne va jamais ! Et je ne parle pas de la météo ! Pour peu qu'il se mette à pleuvoir, le hall de l'hôtel se transforme aussitôt en Mur des lamentations. Toutes les cinq minutes, les clients viennent se plaindre à papa avec des mines de catastrophe : « Quoi ! ? Il y a cinq minutes déjà qu'on vous a demandé quand il ferait beau et il fait toujours aussi mauvais !? » Comme si papa n'était pas seule­ment le patron de l'hôtel, mais aussi le patron du ciel. Comme s'il pouvait, d'un geste, faire dis­paraître les nuages et briller le soleil. Le seul qui ait le sourire, les jours de pluie, c'est Joseph, le jardinier : il passe moins d'heures à arroser... La semaine où cette histoire commence était justement une de ces semaines exceptionnelles où tout va bien. On approchait du 15 août et il faisait tellement beau depuis tellement longtemps que j'avais l'impression que ça allait durer toujours. Le matin, je ne prenais même plus la peine de me contorsionner à ma fenêtre pour aperce-
-voir la couleur du ciel. (Dans ma chambre, hélas, pour voir le ciel, je suis obligé de faire l'acrobate au-dessus du vide. C'est le triste sort des enfants d'hôtelier : les chambres avec vue, on les laisse aux clients.) Comme je ne suis pas vraiment champion en gymnas­tique, je ne voyais pas l'utilité de risquer un torticolis pour constater la même chose que tous les matins précédents : ciel bleu d'azur, bleu de carte postale... Conséquence de cette météo de rêve, le beau fixe régnait aussi dans l'hôtel. Papa faisait sa comptabilité en chantant « Colchiques dans les prés » si fort qu'on l'entendait de son bureau jusque dans la cuisine. Madame Simone, la cuisinière, gagnée sans doute par ce signe de rare bonne humeur, s'était lancée dans plusieurs recettes nouvelles et originales, dont des coquilles Saint-Jacques aux poireaux que tous les clients sans exception avaient jugées fameuses. Certains avaient même applaudi à la fin du dîner... jusqu'à ce que madame Simone quitte ses fourneaux pour venir saluer, toute rose de fierté, dans la salle à manger. Guitte, la femme de chambre, avait un nouvel amoureux, ce qui arrive assez souvent et la met toujours en forme. Mais cette fois, plus que jamais. Il était espagnol, s'appelait Marcello et venait la chercher tous les soirs après le service, sur sa moto rouge. Même Bébé-Lu, le fils de Guitte, qui pique généralement des crises contre les amoureux de sa maman, l'avait adopté. (Il faut dire que Marcello avait marqué des points en offrant à Bébé-Lu des lunettes de soleil clignotantes que celui-ci passait son temps à mettre et à enlever pour voir si elles clignotaient toujours... ) Le seul à se montrer un peu moins joyeux que la moyenne, c'était Joseph, le jardinier. Forcé­ment : le soleil persistant l' obligeait à passer ses soirées le tuyau d'arrosage à la main...
L'hôtel était plein à craquer, mais pour une fois, plein de clients gentils. Le premier étage était occupé par un groupe de Hollandais qui n'arrêtaient pas de sourire et de mettre leur pouce en l'air pour nous faire com­prendre que tout allait bien ! Au second, il y avait un papy et une mamie tout gentils qui ne s'occupaient quasiment que de leur chat. A côté d'eux, un couple tout gentil qui ne s'occupait quasiment que de son bébé nouveau­ né. Au bout du couloir, un papa et sa petite fille tout gentils qui ne s'occupaient quasiment que d'un petit chien qu'ils venaient d'adopter. Et pour dire à quel point tout allait bien : dès que le chat, le bébé et le chien se rencontraient, ils se faisaient des câlins ! À propos de chien et de chat. Il faut que je dise un mot sur Rosy et moi. Rosy, c'est la petite­ fille de Joseph, le jardinier. Elle a neuf ans, moi j'en ai dix. Elle vit avec son grand-père dans une ancienne cabane à outils aménagée en maison au fond du jardin. Ses parents ne sont presque jamais là : ils vendent des fleurs sur les marchés. Rosy, c'est tout le contraire de moi : grande, maigre, sportive, énervée, dernière en tout, première en gym... Moi, je suis plutôt pas (très) grand, pas (tout à fait) mince, pas ( du tout) sportif, calme, premier en tout, dernier en gym... Bref, depuis le temps qu'on se connaît, on a passé plus de temps à se battre comme chien et chat qu'à se faire des câlins ! Et pourtant, cette semaine-là, entre elle et moi, c'était. .. le BONHEUR ! Il n'y a pas d'autre mot ! Si je croyais à l'astrologie, je dirais que nos planètes devaient être en pleine harmonie. Rosy était d'une humeur... de rose ! Elle qui est souvent plutôt d'une humeur de piment, de cactus ou de châtaigne (dans sa bogue, bien sûr), elle souriait du matin au soir...
Un matin, elle m'a même demandé : « Qu'est-ce qui te ferait plaisir, Georja ? » D'habitude, quand elle m'appelle « Georja » à la place de Georges-Albert, c'est pour me demander quelque chose qui lui ferait plaisir à elle. Mais là, non. C'était vraiment pour me faire plaisir à moi. Encouragé par son sourire, j'ai poussé le bouchon assez loin : je lui ai dit que j'aimerais bien lui apprendre à jouer aux échecs. J'étais déjà en train de me bou­cher les oreilles en attendant ses hurlements de protestation. Mais elle a continué à sourire et elle a dit gentiment : « Mais oui ! Pourquoi pas ! Comme ça, quand tu ne sais pas avec qui jouer, tu pourras jouer avec moi ! » Et je lui ai expliqué les échecs ! Et elle m'a écouté jusqu'au bout ! Elle a même noté certaines règles dans un petit carnet ! Et on a joué ! Plusieurs parties ! Je lui ai laissé gagner plusieurs coups presque sans le faire exprès ! Quand on a rangé le jeu d'échecs, j'étais encore tellement sous le choc que j'ai accepté sa proposition de m'apprendre à jouer au basket. Je sais : je n'ai pas la silhouette d'un basketteur. Ni en hauteur... Ni en largeur... Mais elle n'a pas insisté là-­dessus. Elle m'a fait faire des exercices. Calmement. Progressivement. Sans s'énerver. Sans chercher à m'humilier en mar­quant, par exemple, cinquante paniers de suite sous mon nez. (Ce qu'elle est parfaitement capable de faire, je la connais !) D'ailleurs, elle m'a tellement bien expliqué le basket que j'ai réussi à en marquer deux, moi, des paniers ! Les deux premiers de ma carrière ! Dans la foulée, elle m'a proposé de participer le lendemain à un triathlon : natation, course, vélo. Je n'ai pas dit non. Je n'ai pas dit oui, non plus, remarquez. J'ai juste suggéré qu'on pourrait peut­-être aussi aller pêcher... Je l'ai bien regardée : elle n'a pas grimacé. En allant me coucher, ce soir-là, je me suis redit que, décidément, j'adore les jours où tout va bien !
Chapitre 2 Atterrissage Le lendemain matin, comme le soleil était toujours au rendez-­vous et que la journée promettait d'être chaude, j'ai décidé de commencer par une délicieuse surprise pour Rosy : lui rapporter une glace en même temps que les croissants. (Je précise que c'est moi qui vais, chaque matin, chercher en vélo les croissants pour les clients...) Rosy adore les glaces. Moi aussi, mais elle a plus de chance que moi : elle peut en manger autant qu'elle veut (d'ailleurs, elle ne s'en prive pas), elle ne grossit jamais. Ou si elle grossit, ça ne se voit pas. Tandis que moi... bon, passons ! Une glace au petit déjeuner ! Dans la série « la semaine du bonheur », j'étais fier de mon idée ! J'ai glissé mon porte-mon­naie dans la poche de mon short (pour les croissants, l'hôtel a un compte) et j'ai traversé le hall où papa chantonnait déjà en feuille­tant son cahier de réservations... « Eh bien, fiston, tu es tombé du lit ? - Non, papa, je vais chercher les croissants ! » Papa a jeté un coup d'œil à sa montre : « Pile à l'heure ! Félicitations ! - Combien j'en prends ? - Comme hier... Non... 3 de moins : les clients du 7 sont partis... Quelle saison, fiston, quelle saison : c'est la première chambre qui se libère depuis 15 jours ! » Dehors, une petite brume légère flottait au-dessus de la mer. Par instants, la douce odeur du sable et de la mer parvenait jusqu'à mes narines. Mon vélo, que j'avais nettoyé et graissé à fond quelques jours auparavant, roulait sur l'asphalte comme sur un ruban de réglisse. En ville, les commerçants s'activaient déjà, lavant à grande eau devant leurs portes, garnis­sant vitrines et présentoirs de sucettes ou de cartes postales, en prévision des touristes qui n'allaient pas tarder à débar­quer...