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Les petits jeux d’Attila

Les petits jeux d’Attila

13-15 ans - 23 pages, 3312 mots | 26 minutes de lecture | © Zoom éditions, 2011, pour la 1ère édition - tous droits réservés


Les petits jeux d’Attila

13-15 ans - 26 minutes

Les petits jeux d’Attila

Atti, un jeune enfant des steppes, passe son temps à jouer aux Latroncules (une sorte de jeu d'échecs asiatique) avec ses amis. L'enfant, benjamin de la fratrie, est brillant et réputé comme tel. Mais quand son frère aîné lui fait découvrir les vertus mortifères d'une plante anodine, Moundi qui deviendra plus tard Attila, ne peut s'empêcher de l'expérimenter sur tous les animaux qu'il rencontre. Une vocation semble née pour ce stratège en herbe, expérimenter les germes de la destruction. Vocation qui le poussera à devenir « le Fléau » du Monde

"Les petits jeux d’Attila" vous est proposé à la lecture version illustrée, ou à écouter en version audio racontée par des conteurs et conteuses. En bonus, grâce à notre module de lecture, nous vous proposons pour cette histoire comme pour l’ensemble des contes et histoires une aide à la lecture ainsi que des outils pour une version adaptée aux enfants dyslexiques.
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Extrait du livre Les petits jeux d’Attila

Les petits jeux d’Attila Écrit par Calouan et illustré par Illustration de Jessica Lisse Conception graphique de zOom éditions


Les petits jeux d'Attila
Moundi, approche un peu ici, je te prie. Le petit garçon haussa les épaules et se replongea dans sa concentration. Pas facile de gagner aux Latroncules contre Ernakh, il était vraiment très fort. Et puis, il n’aimait pas quand Bleda l’appelait Moundi. - Hum… - Moundi !
- Arrête ça ! Je ne m’appelle pas Moundi. Le garçonnet prit une voix qui n’admettait aucune réplique et chez un enfant de son âge, c’était assez surprenant. La moue qui s’ensuivit corroborait son refus d’une telle appellation. Ernakh le surveillait du coin de l’œil. Il savait qu’à la moindre défaillance de son adversaire, il déplacerait un de ses pions sur la bonne case et l’autre serait vaincu. Il avait une revanche à prendre. Lors de la dernière partie, c’est Atti qui l’avait remporté. Il ne souhaitait donc pas intervenir dans la discussion qui avait lieu entre les deux frères. Ca semblait presque étrange de penser que ces deux-là étaient frères d’ailleurs. Bleda avait presque vingt ans, Atti à peine cinq. On aurait pu les prendre pour père et fils. Mais si le grand avait une carrure impressionnante et une voix bien rauque, c’était souvent le petit qui faisait sa loi, imposant ses caprices sans grande difficulté, tant sa supériorité intellectuelle lui donnait de l’emprise sur son nigaud de frère. Du haut de ces cinq ans, l’ami d’Ernakh était très perspicace et jouer contre lui aux Latroncules était un délice. La première fois qu’ils s’étaient retrouvés
l’un en face de l’autre, c’était par un pur hasard, Ernakh réfléchissait, en retrait, à réaliser des coups surprenants pour le prochain tournoi de Latroncules qui était organisé lors de la Lune pleine et Atti chevauchait seul à travers les grands arbres, comme le faisait souvent cet enfant taciturne. Il hurlait des cris guerriers qui dérangeaient Ernakh et celui-ci avait lancé une pierre bien visée sur le bruyant cavalier, espérant lui signifier ainsi son besoin de silence. Touché, Atti était descendu de selle et s’était approché, menaçant, de celui qui avait jeté le projectile efficace. Poings levés, les deux garçons grognaient en se toisant. Ernakh n’était pas un costaud et n’aimait pas la violence mais quand Atti avait tenté de lui décrocher un direct, il s’était reculé et avait crocheté la jambe du garçonnet trop agacé pour s’en apercevoir. Déséquilibré, Atti avait basculé au sol, gesticulant afin d’attraper le pied de son adversaire. Vexé, il ne savait comment atteindre celui qui était à l’origine de cette position inconfortable dans laquelle il se trouvait. Instantanément attiré par la plaque posée sur une pierre plate, recouverte de pions vers laquelle Ernakh était penché quelques instants avant, il se dit qu’il allait briser le jeu de l’insolent qui lui
tenait tête. Ce jeune inconnu ne savait pas encore à qui il avait à faire et Atti allait se charger de le lui montrer.Le garçonnet de cinq ans baissa les yeux et après quelques instants de réflexion, ilen comprit tout de suite la logique.Oubliant la bagarre qui attendait, il tendit une main et déplaça un des jetons du vilain dans une stratégie incontestable.Impressionné, Ernakh avait laissé tomber sa colère et sa prudence et avait applaudi le merveilleux coup que venait de jouer Atti. Un éclat de rire partagé avait suivi et le respect était né illico entre les deux enfants qu’une franche poignée de mains avait scellé.Et pour la première fois de sa vie, on voyait régulièrement désormais le garçon de cinq ans en compagnie. Lui qui se contentait de monter à cheval, poser des pièges pour les petits animaux naïfs et cueillir des baies rouges pour s’en baffrer avec gourmandise, il avait réussi à lier connaissance. - Pour l’amour des dieux, Atti, viens, immédiatement ! Le petit garçon soupira. La voix de Bleda était devenue plus autoritaire. Mais qu’avait donc de si urgent à lui dire son aîné qu’il le dérangea dans sa
partie contre Ernakh? Atti n’était pas très âgé mais il avait une vraie passion pour ces jeux de logique, de réflexion et de stratégie et Ernakh était le plus ardu de ces compagnons de jeu. Les deux garçons pouvaient passer des heures entières, penchés sur le carré de pierre à déplacer leurs pions avec intelligence. Ils s’étaient isolés dans un coin de la forêt pour ne pas subir les dérangements causés par les bruits de lutte. Comme chaque jour, tout un groupe de garçons s’empoignait à l’endroit le plus ensoleillé du bois, l’endroit le plus dégagé donc. Les chocs des corps se répétaient et les cris étouffés meublaient le silence de cette journée paisible. Pas de chasse prévue aujourd’hui, les hommes du clan avaient ramené suffisamment de gibiers lors de leur dernière sortie pour satisfaire la faim de tous encore quelques jours.Le plus jeune des frères se souleva et ses jambes entourées de peaux de bêtes firent crisser le tapis de feuilles mortes sur lequel il était assis. Sans quitter des yeux la plaque de pierre où étaient, astucieusement, disposés les pions, il frotta la paume de ses mains sur le bas de sa tunique comme pour se débarrasser d’une poussière invisible.En soupirant, il se décida enfin à s’éloigner de l’endroit où Ernakh resterait à l’attendre mais où venait de s’évanouir de façon presque définitive
toute éventualité pour lui de remporter cette partie. - Quoi? La question fut posée avec brusquerie et Bleda fixa son cadet avec amusement. Il se prenait pour qui ce petit? Il allait falloir qu’il apprenne un peu le respect et la politesse celui-là. Mais à voir le visage renfrogné d’Atti, il avait surtout envie de rire. Quel sale gosse! Entêté et fin stratège. Tout son père. Moundzouk. Mêmes grands yeux sombres, même ride qui lui barrait le front lorsqu’il était contrarié, même dégaine trapue. Du haut de ses cinq ans, Atti avançait déjà les bras ballants de chaque côté du corps, les épaules voûtées. C’était la raison pour laquelle d’ailleurs Bleda surnommait son petit frère Moundi. Ce qui, pour lui, signifiait «petit Moundzouk». Atti n’aimait pas cette comparaison permanente avec son père qu’il ne connaissait pas et qui s’était fait bêtement tuer au combat. Il n’était pas de cette trempe-là, lui, à se laisser avoir sottement par un adversaire.Il approchait de son grand frère sans le lâcher du regard, son esprit totalement accaparé par le coup qu’il allait jouer face à Ernakh quand il reprendrait la partie.